Comme au bon vieux temps [PV Gil]

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Une autre journée débutait. Le soleil brillait, le temps s'annonçait donc clément pour le reste de la journée. Voir le temps défiler ainsi pouvait toutefois être stressant lorsqu'on savait qu'il ne nous restait sans doute qu'un nombre limité de jours à vivre dans ce monde, condamné à finir dans l'Abysse par ce sceau de contractant illégal gravé à jamais sur le torse comme un tatouage indélébile. L'inquiétude n'était toutefois pas présente dans mon cœur, un peu à cause de ma personnalité, sans doute. L'habitude de m'adapter à toutes les situations possibles avec un sourire m'empêchait de paniquer alors que c'était pourtant très certainement la réaction que l'on attendait de ma part. Cela me semblait pourtant tout à fait logique comme réaction dans ce cas-ci : il ne servait à rien de déprimer pour quelque chose qui était inévitable, après tout ! Et puis, de toute façon, tout le monde finissait par mourir un jour où l'autre... Notre temps à tous était compté, certains chanceux avaient simplement droit à quelques grains de sable supplémentaires dans le grand sablier de la vie. C'était le destin, le risque de posséder ce coeur qui battait dans notre poitrine et pourtant aussi la seule raison pour laquelle nous pouvions profiter pleinement de l'existence...

Et il faut dire que depuis le jour où j'avais fait ce contrat illégal avec Alice, la vie n'était pas de tout repos. Ce n'était pas un reproche envers quoi que ce soit ou même quelqu'un, hein ! N'allez pas vous imaginer des choses, je l'avais accepté après tout ce contrat, il fallait donc que j'assume les conséquences de cet acte ! Non, je ne faisais qu'étaler les faits afin de les reconnaitre. La traque des Chains et tous les autres éléments que cela entraînait, cela causait parfois des journées très fortes en émotions. Enfin, cela faisait changement, autant d'activité et c'était probablement... Autrefois, je m'ennuyais souvent et c'était une des raisons pour lesquelles j'étais une véritable petite peste, enfin je crois. Parce que j'étais seul, ou du moins le seul garçon de mon âge, et puis Ada ne s'intéressait pas toujours à mes jeux... Aujourd'hui les choses avaient bien changé, concernant un aspect tout comme l'autre. Mais inutile de ressasser ce passé lointain, maintenant, n'est-ce pas ? Cela ne me ferait que déprimer, ce qui n'était jamais une bonne chose, pour qui que ce soit. D'abord parce que cela n'arrangeait pas les choses, mais aussi parce que j'avais décidé que cette journée-ci serait particulière, très différente des autres. Pas de mission prévue, c'était donc le jour idéal.

Après toutes les péripéties liées à cette collaboration avec Pandora, un petit moment de calme n'était pas de refus, n'est-ce pas ? Rien de mieux pour ceci que de s'amuser un peu. J'avais donc l'intention de passer un peu de temps avec mon ami de toujours loin de toute cette histoire et donc du quartier général. Gilbert était toujours inquiet pour moi, alors cela lui ferait grand bien de relaxer un peu, avec des soucis de moins grande importance. Parce que, il ne faut pas se faire d'illusions, il est tout de même question de Gil, alors forcément il s'inquiète toujours un petit peu, surtout quand le sujet me concerne... Enfin, peu importe, puisque j'avais l'idée parfaite pour nous dérider tous les deux ! Bon, d'accord, ce serait un peu aux dépends de mon ami, et alors ? Il ne serait quand même pas blessé bien sûr, non, je comptais juste l'embêter un peu et gentiment, ce qui n'aurait pas été la première fois... Je lui demandai donc dans une note de venir me rejoindre au manoir Bezarius qui, il fallait l'avouer, était un peu vide et délaissé ces derniers temps. Il faudrait certainement un peu de temps au jeune homme avant d'arriver jusqu'ici. Cela me laissait donc plus de temps pour décider des derniers détails de mon plan, qui ne pouvait pas échouer ! Ce cher serviteur ne savait décidément pas ce qui l'attendait, ahahah...

Le soleil traversait les fins rideaux blancs de la chambre de Gilbert. Les rues de Réveil étaient déjà baignées de lumière, et le jeune homme ouvrit les yeux, ébloui. Il était dix heures, et le Nightray était encore dans son lit. D'habitude, cela n'arrivait jamais, mais il faut dire que ces derniers jours pour lui n'étaient pas de tout repos. Oz était revenu de l'Abysse, les Baskervilles étaient de retour, tout semblait être fait pour tourmenter son maître... Et Gilbert se faisait un sang d'encre en permanence. Il était heureux que le Bezarius soit de nouveau là, mais qu'est-ce qu'il pouvait attirer les ennuis ! Et à chaque fois, il se rongeait les sangs pour lui ! Quand cesserait-il donc d'être aussi imprudent ?

Enfin bref. Il s'étira sous sa couette, et sortit de son lit, les membres encore engourdis de sommeil, se traîna jusqu'à la fenêtre donnant sur la rue. Le léger brouhaha des passants réveilla doucement le Nightray. La ville était magnifique le matin, vivante, joyeuse, gaie, comme si le malheur n'existait pas dans ce monde. Il sourit en voyant deux enfants courir, jouant à s'attraper. Une vague de nostalgie l'envahit, et il s'accouda au rebord de sa fenêtre, laissant ses souvenirs exhumés... Oz et lui jouaient souvent à ça quand ils étaient enfants. Gilbert perdait souvent, plus petit et moins résistant que son maître. Mais ses souvenirs de galopades dans le manoir le fit sourire inconsciemment. C'étaient vraiment des moments qu'il ne pourrait oublier...

Alors qu'il était profondément plongé dans ses pensées, il entendit frappé à la porte de son appartement. C'était un message, d'Oz. Quand on parlait du loup... Le Nightray était convié à se rendre au manoir Bezarius. Pas de problème. Sans même se poser une seule question, il se dépêcha de se préparer, et dix minutes plus tard, se trouvait dans un fiacre en direction du manoir. Ce ne fut qu'une fois qu'il fut installé, qu'il se demanda pourquoi son maître le demandait. C'était son jour de repos, et il pensait que le jeune garçon préfèrerait le passer en compagnie d'Alice... Mieux valait qu'il ne pense pas trop à elle, sinon, ça allait mal finir pour la calèche. Cette... fille détruisait le corps d'Oz à petit feu tous les jours. Et le Nightray se demandait encore comment il avait fait pour se retenir de l'éliminer. Déjà qu'elle était insupportable, mais de savoir qu'elle était nuisible pour le Bezarius... Ça le rendait fou ! Il orienta donc son esprit vers d'autres sujets. Pourquoi son maître l'avait-il quémandé ? Cela restait bien le plus grand mystère de ce jour. Enfin, le fiacre s'arrêta et le jeune homme descendit, de plus en plus inquiet. S'il l'avait appelé de si bon matin, ce n'était pas pour rien ?

Spoiler:

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Une fois celui-ci arrivé, j'accueillis mon cher Gil dans le manoir de façon convenable, quoique je ne lui parlai pas tout de suite du but de cette visite, m'enquérant plutôt de s'il avait fait bon voyage. Pas question qu'il se doute de quoi que ce soit pour le moment, cela gâcherait la surprise. Tout sourire, je le menai plutôt à la salle à manger où se trouvaient un peu de thé et des biscuits que j'avais fait préparer par Miss Kate et les autres servantes. Après tout, logiquement, cette rencontre avait pour seul but de discuter un peu avec mon plus fidèle ami. Comme nous n'avions pas souvent du temps à passer ensemble, enfin, juste tous les deux, ce serait l'occasion de déballer ce qui n'allait pas de part et d'autre, car je voyais bien que quelque chose tracassait parfois mon cher serviteur... Et puis aujourd'hui serait différent. Nous ne serions pas dérangés par qui que ce soit. Oncle Oscar était présent dans le manoir, évidemment, puisqu'il était le duc officiel pendant l'absence de mon père – qui n'était pratiquement jamais là en fait, mais bon, ce n'était pas comme si ce détail était vraiment important – mais il savait respecter l'intimité des autres lorsque nécessaire. Puisque je lui en avais fait la demande, il se tiendrait à carreaux, dans son bureau. Tout devrait donc de dérouler comme sur des roulettes !

J'espérais simplement que Gilbert ne m'en voudrait pas de l'embêter un peu tel que je prévoyais le faire. Dans tous les cas, il finirait sans doute par me pardonner, comme toujours, n'est-ce pas ? Dommage tout de même qu'il n'y ait plus de chats ici depuis qu'Ada était au lycée. La tête que faisait mon ami devant ces animaux était vraiment tordante à chaque fois, après tout ! Je devrais me contenter de courir dans les couloirs pour ensuite me cacher quelque part. M'attraperait-il avant que j'aie réussi à mettre en place ce petit jeu ? Cela serait bien étonnant puisque j'userais de l'effet de surprise. Mon corps avait aussi dix ans de moins que le sien, donc j'étais dans doute plus rapide, ahahah. Et puis je ne fumais pas contrairement à mon ami, donc ma santé n'était pas menacée de quelconque façon que ce soit. Ce serait triste tout de même si mon pauvre Gilbert finissait par avoir le cancer... Mais bon ! Nous n'étions pas supposés déprimer aujourd'hui. C'était ce dont j'avais décidé. Je chassai donc ces pensées inquiétantes.

« Et si on allait voir si le manoir a changé ? » finis-je par demander en me levant de mon siège.

J'avais beau ne pas être revenu ici depuis longtemps, à cause des mauvais souvenirs, je savais bien qu'aucune rénovation n'avait été effectuée ces derniers temps. Je l'avoue, ce n'était qu'un prétexte pour se remettre à marcher. Sauf qu'évidemment, moi je ne marchais pas. Ma course folle s'arrêta dans le jardin. Là où tout avait commencé, le jour de la Cérémonie, lorsque nous étions tombé dans ce trou où se trouvait un tombeau caché et où nous avions trouvé cette montre à gousset qui ne me quittait plus... Je grimpai aux branches de notre arbre préféré, me cachant là. Oui... Sans doute était-ce par nostalgie que j'avais décidé de venir ici aujourd'hui...

Où avais-je semé Gilbert ? Arriverait-il a me retrouver ? C'était la tout le plaisir de ce petit jeu, n'avoir aucune certitude.

Le ciel était bleu azur, comme une de ces journées qui lui semblaient si lointaines, où Oz et lui, Gilbert, s'amusaient des heures et des heures dehors. Revenir à ce manoir était pour lui un symbole de nostalgie. Cela faisait dix ans qu'il n'y avait pas mis les pieds. Non, en l'absence de son maître, il n'avait pas voulut y retourner. Peut être pour ne pas se rappeler de souvenirs douloureux, tant que le jeune Bezarius n'était pas de retour... Il n'en savait rien. Mais l'envie de revenir là-bas ne l'avait pas vraiment pris. Aujourd'hui pourtant, le fiacre dans lequel il se trouvait allait l'y conduire directement. Il était accoudé à la fenêtre de son transport, celle-ci légèrement entrouverte, pour pouvoir laisser sortir la fumée grise de la cigarette du brun. Oui, le Nightray fumait pas mal, et encore plus quand il était stressé. Revenir dans le manoir de son enfance lui faisait un peu peur. Mais qu'est-ce qui ne traumatisait pas le grand trouillard qu'était Gilbert ? Enfin, le bâtiment des Bezarius se dessina à l'horizon, entre la rangée d'arbres qui y menait. Son coeur accélérait dans sa poitrine. Il se serait presque rongé les ongles s'il avait pu.

Les deux chevaux qui tiraient la calèche s'arrêtèrent devant l'entrée magnifique. La portière s'ouvrit et la silhouette d'Oz Bezarius se dressa juste devant lui, un sourire aux lèvres. Heureux de voir son vieil ami, apparemment. Le Nightray, qui s'était fait un sang d'encre sur le but de sa venue, était presque soulagé qu'il n'y ait rien. Enfin, pour l'instant. Il l'accueillit chaleureusement, comme s'il les événements des jours précédents n'avaient jamais eu lieu. Gilbert n'était pas là pour déprimer, et chassa les péripéties antérieures de ses pensées. Le blondinet l'amena dans la grande salle à manger, où du thé et des biscuits les attendaient. Le jeune homme était de plus en plus intrigué. Pourquoi tant de petits soins pour lui ? Après tout, c'était un jour de repos, mais être servi ici comme un noble, alors qu'avant il y était serviteur avait quelque chose d'un peu gênant. Il attendait patiemment que Oz lui explique pourquoi il avait été appelé si tôt ce matin, la nervosité le rongeant de l'intérieur. Enfin, son maître demanda, toujours un sourire éclairant son visage :

« - Et si on allait voir si le manoir a changé ?
- Oui, si tu veux... » répondit le Nightray, l'air surpris.

Oz n'était-il pas revenu déjà dans ce manoir à plusieurs reprises ? Si c'était le cas, pourquoi lui demander de venir avec lui voir les changements ? Il devait bien être au courant... Gilbert commençait à croire que cette proposition n'était pas dénuée d'intérêt. Le blond avait une idée derrière la tête, il en était sûr. Il avait toujours cet air mi-triomphant, mi-satisfait sur le visage lors de ces situations. A peine eut-il pensé à ça, que le jeune Bezarius se mit à courir devant lui, le laissant pantois, et seul. Qu'est-ce qui lui était passé par la tête ? Mais sans continuer à se poser des questions, il se mit à la poursuite de son maître, ne pouvant pas le laisser filer comme ça. le Nightray était sûr que le jeune garçon allait se rendre dans le jardin, par ce temps magnifique, c'était presque obligé. Il cherchait, tout en galopant, où son intrépide ami pouvait bien être allé. Il n'allait pas crapahuté dans tout le domaine pour le retrouver ! Quand soudain, une petite lumière sembla s'allumer dans son regard. Il y avait bien un endroit, où le blondinet se rendait à chaque fois qu'il s'enfuyait, à l’abri des regards.

A son tour, Gilbert décida de surprendre son maître. Arrivé à l'arbre où il était pratiquement sûr d'y trouver le garçon, il s'adossa, le dos contre le chêne, et fit semblant d'être complètement épuisé, au bord de la crise d'asthme. Oui, le Nightray avait développé de l'asthme en fumant trop. Il exagérait bien sûr à ce moment là, mais il pouvait paraître totalement crédible aux yeux de son ami. Il espérait le prendre par surprise, afin de lui jouer un petit tour. Avec Xerxes Break et Vincent à ses côtés, il avait lui aussi développé un certain talent pour jouer la comédie devant son frère, ou rendre la pareille aux vilains tour de l'albinos. Il devenait même plutôt doué dans ces deux domaines.

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Avec un peu de recul, j'aurais certainement du trouver une meilleure cachette. Cela n'aurait pas été une tâche si difficile de toute façon, puisque je connaissais les lieux comme le fond de ma poche. J'avais grandi ici après tout et la plupart de mes moments de solitude avaient été comblées par l'exploration du manoir, lorsque je n'étudiais pas. J'aurais donc pu trouver une meilleure cachette, mais je ne l'avais pas fait. Je voulais que Gilbert soit capable de me trouver après un certain temps. Après tout, avec une telle température à l'extérieur, il devait être logique que je choisirais le jardin pour me cacher. Après, tout n'était qu'une question de réflexion avant que mon ami ne trouve la solution à cette partie de cache-cache. Il faut croire que ma capacité à jouer des tours pendables s'était détériorée au fil du temps... Enfin, il faut dire que le but principal de ce jeu était de se changer les idées, ce dont j'avais pour ma part bien besoin. Après tout, nos vies étaient constamment menacées par les Chains désormais et ma vie s'égrenait selon les mouvements de l'aiguille de ce sceau sur mon torse... Un peu de légèreté ne faisait de mal à personne, non ? Je ne voyais donc pas en quoi mes actions pourraient être mauvaises.

Voilà déjà des bruits de pas qui se rapprochaient, tel que je le pensais. Cela me sortit de mes pensées. Je ne faisais pas le moindre bruit, mais si Gilbert s'était douté que je m'étais caché ici, pour venir dans les environs, il me trouverait sans doute. Il y avait toutefois un détail qui était étrange. Au lieu de lever la tête vers les branches, le jeune Nightray s'était effondré contre l'arbre. Sa respiration semblait courte, comme s'il avait un problème quelconque. L'inquiétude s'empara de moi. Était-il dans cet état lamentable à cause de la course que je l'avais forcé à faire ? Je savais que ma santé était sans doute meilleure que la sienne, ne serait-ce qu'un tant soit peu, mais tout de même, je ne pensais pas qu'il pourrait faire un malaise. Un vieil homme comme notre chapelier préféré, peut-être, mais pas mon cher Gilbert... Je descendis donc en bas de l'arbre aussi rapidement que possible tout en évitant de me blesser – oui, un malade potentiel c'était suffisant après tout ! – et me penchai vers lui, la mine très soucieuse, lui va grippant les épaules fermement et pourtant avec douceur, tentant ensuite de fixer ses prunelles dorées avec mon propre regard, pour qu'il sache qu'il n'était pas seul dans ce moment difficile.

« Gil ! Qu'est-ce qui ne va pas ? Tu as besoin de quelque chose ? » demandais-je d'une voix un peu tremblotante sous l'émotion.

Je désirais vraiment l'aider, surtout si tout était de ma faute. J'espérais qu'il pourrait me répondre malgré sa respiration haletante. Tout cela finirait très mal s'il ne pouvait le faire, je le sentais. Si c'était une crise d'asthme comme le signalait tous les indices jusqu'à présent, il avait sans doute un inhalateur ou quelque chose du genre sur lui, n'est-ce pas ? J'espérais vraiment que ce soit le cas. Retrouver tonton pour lui demander de l'aide prendrait trop de temps et je ne voulais pas laisser le malade tout seul. De toute façon, la panique montante m'aurait empêché de changer de position, me paralysant devant le brun. Je ne voulais pas que mon meilleur ami meure, moi ! Je ne voulais pas perdre quelqu'un qui m'était cher, malgré tous les défauts qu'on aurait pu lui reprocher, à cause d'une blague ratée et bien stupide en fait. Je me retrouverais bien seul sans mon ami de toujours, malgré la présence d'Alice et de tous les autres... Je ne voulais pas être seul, plus jamais...

Je t'autorise à me fusiller sur place pourle temps de réponse ><

Gilbert se laissa tomber au pied de l'arbre où Oz était perché. La respiration haletante, il avait une main sur son torse, agrippé à sa chemise. Oui, le jeune homme était très bon en comédie. Car aussi dramatique que semblait la situation, elle n'en était pas moins totalement fausse. A vrai dire, le Nigthray était certes, un peu essoufflé, mais il en rajoutait des tonnes pour faire une farce à son maître, qui l'avait fait galopé dans tous les couloirs du manoir. Alors il lui avait concocté une petite vengeance à la manière "Gil". Ce qui n'était pas terrible au final, mais au moins, il fit venir Oz dans son jeu. Celui-ci dégringola à la va-vite les branches du chêne pour se précipiter au secours du brun. Il baissa la tête, continuant sa respiration saccadée et intermittente. S'il était chassé de la famille Nightray, au moins, il était sûr de retrouvé un nouveau job dans le théâtre, avec ses talents d'acteurs qu'il avait développé. Enfin... Ça dépendait dans quelles situations, car il était toujours incapable de mentir correctement. Une tare sans doute, que lui reprochait sans cesse Vincent. Lui, c'est sûr, n'avait aucun mal... Revenons à nos moutons, ou plutôt au corbeau qui se donnait en spectacle pour apitoyer le pauvre Oz, qui s'exclama :

« - Gil ! Qu'est-ce qui ne va pas ? Tu as besoin de quelque chose ? »

Puis soudain, contre tout attente, Gilbert releva la tête d'un coup, faisant sursauter le blond, un sourire tirant ses lèvres. Puis, pour le rassurer, il passa une main dans les cheveux de son maître, les ébouriffant au passage. Son intention était juste une petite revanche sur lui, comme il l'avait fait courir un peu partout dans le manoir. Heureusement qu'il se rappelait que cet arbre était un lieu qu'Oz affectionnait particulièrement il y a dix ans, sinon, il serait encore en train de courir partout ! Bon, il devait avouer que ce n'était pas très malin de l'avoir inquiété comme ça, mais une blague en valait bien un autre non ? Encore que, celle de Gil était plus à blâmer. Puis, il chassa le petit sourire de son visage, qui retrouva son côté sombre, et s'excusa humblement de sa facétie :

« - Désolé Oz, c'était ma petit revanche sur le fait que tu m’aies fait courir partout ! »

Il commençait à fatiguer un peu le vieux Gilbert, c'est vrai quoi, à vingt-quatre ans, on devient peu à peu sénile... Non, mais cette course qu'il aurait fait sans problème autrefois l'avait tout de même un peu essoufflé. Il se releva en s'aidant du tronc derrière lui, les jambes coupées. C'était décidé, il arrêtait de fumer... Jusqu'à ce qu'il en ait envie. La volonté n'était pas vraiment le point fort du jeune homme. Il tendit une main à Oz pour le relever à la force de ses bras qu'il avait encore. Non, il ne courait pas encore sur les mains. Il s'étira levant les bras au-dessus de sa tête, et bailla un bon coup. On n'avait pas idée de ce qu'un jeune homme de cet âge là vivait... Après quelques instants de silence, qu'il brisa, il demanda à Oz, d'une voix plus sérieuse :

« - Tu m'as fait venir simplement pour ça, ou alors tu as quelque chose à me demander ? »

Autant être direct tout de suite, et savoir le but de sa visite. Parce qu'à part galoper dans tous les sens, il n'avait pas fait grand-chose de constructif. A moins que Gilbert n'ait encore rien compris -une fois de plus- et que justement le but de sa présence au manoir Bezarius était de ne rien faire de précis. Simplement de se détendre et prendre du plaisir. Ces mots dont le brun avait presque oublié la signification.

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Sans la moindre réponse, je commençais réellement à m'inquiéter sérieusement à propos de mon bon ami Gilbert, même si je ne savais toujours pas quoi faire. Son malaise était peut-être plus grave que je ne le pensais ? Pourvu que son cœur n'ait pas cessé de battre ! Paniqué, j'allais le secouer un peu pour vérifier qu'il était toujours conscient et qu'il m'avait entendu, surtout. Tout à coup, il releva la tête en souriant, comme si de rien n'était. Sous la surprise, je tombai sur l'herbe, assis, avant de me faire ébouriffer les cheveux. Je n'étais pas certain de comprendre ce qui était en train de se passer. Tout cela n'était qu'une plaisanterie ? Pourquoi ? Je baissai la tête puisque mes yeux étaient un peu larmoyants; ce n'était pas vraiment une façon de cacher mes sentiments, non, je croyais seulement que si Gil me voyait dans cet état, il ne pourrait peut-être pas m'offrir une explication quelconque. Heureusement, cela ne prit pas longtemps avant que celles-ci me soient données. Une vengeance ? Je ne pensais pas l'avoir fait courir tant que ça puisqu'il m'avait trouvé si rapidement... Mais s'il disait que je méritais cette blague de mauvais goût, c'était sans doute le cas. Je clignai des paupières pour chasser toute trace de tristesse dans mon regard avant d'hocher un peu la tête pour faire comprendre au fumeur que je lui pardonnais, avant que celui-ci ne m'aide à me relever. Pourtant l'herbe était confortable. Enfin j'imagine que cela valait mieux ainsi, pour éviter de salir nos vêtements ou encore d'être malade... De sa voix de plus en plus sérieuse, Gil demanda ensuite pour quelle raison je l'avais fait venir ici. Avait-on vraiment besoin d'une raison pour avoir envie de passer un peu de temps avec son meilleur ami ? Après tout, j'étais conscient de l'avoir un peu délaissé depuis toutes ces histoires concernant l'Abysse. Il faut dire qu'on n'avait pas souvent eu l'occasion de souffler... Un maigre sourire s'étira sur mes lèvres. Moi-même ignorait le temps exact qu'il me restait avant que ce sceau de contractant illégal serait complété. Ne fallait-il pas en profiter un peu, avant qu'il ne soit trop tard ? Et puis Alice et lui n'étaient pas exactement en bons termes, alors je ne voulais pas les forcer à être ensemble...

« Oh, tu sais, pour une fois que nous ne sommes menacés par personne, je voulais juste passer une journée tranquille... Pardon de t'avoir empêché de faire quelque chose de plus important », répondis-je simplement en continuant de sourire de façon un peu rêveuse, tel que je le faisais à chaque fois que je pensais à autre chose que ce dont je parlais. Ce n'était pas toujours facile de changer d'attitude, après tout. Je sortis d'ailleurs des biscuits de mes poches pour les grignoter, en offrant même un à mon ami d'une voix un peu absente.

Ce serait mentir que de dire que j'étais vraiment parfaitement heureux en ce moment, malgré les conditions réunies. Toutes sortes de choses me préoccupaient, mais je n'avais pas à faire mon égoïste, tout de même... Peut-être que tout cela n'intéressait pas le contractant de Raven. J'aurais dû être honnête avec lui...

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